Leïla Sebbar romancière et nouvelliste







Journal d’une femme à sa fenêtre
(suite 56)

Novembre, décembre 2017, janvier 2018



Polémique sur le harcèlement sexuel et l’affaire Tariq Ramadan, le prédicateur musulman accusé de viol avec violences par deux femmes musulmanes

Femme en robe blanche sur un mur rue Hovelacque, Paris 13 (fin 2017, début 2018) (coll. part.).

Ces trois photos que j’ai prises, rue Hovelacque dans le 13e arrondissement de Paris, lorsque je marchais pour aller chez Catherine Dupin, disent bien pour moi le processus d’agression sexuelle sur image charnelle.

Sur un mur, il y a plusieurs mois, près d’un chantier clôturé par des panneaux verts, on a collé, dessiné une personne debout. Une femme, belle. Elle porte une robe blanche, elle fume, sa main gauche sur la hanche, un geste gracieux. Le regard noir, direct arrête les passants. Si elle parlait, que dirait-elle ? D’une semaine à l’autre, j’ai assisté à la dégradation progressive de l’image, de la jeune femme à qui on a arraché des morceaux de sa robe, de haut en bas, depuis le visage jusqu’aux pieds. Femme déchirée par des mains rageuses, haineuses. Elle a en partie disparu sous des papiers collés puis arrachés comme la robe blanche. Elle a disparu, on l’a assassinée par harcèlements multiples. Meurtre sexuel du féminin. Attaques violentes contre une femme affichée, une femme de papier qui représenterait toutes les femmes qui s’exposent, insolentes de beauté.
Symboliquement, on viole une femme, on tue les femmes.
Pour ces trois mois, je n’ai rien d’autre à dire.

 






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