Leïla Sebbar
romancière et nouvelliste
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Femme en robe blanche sur un mur rue Hovelacque, Paris 13 (fin 2017, début 2018) (coll. part.). Ces trois photos que j’ai prises, rue Hovelacque dans le 13e arrondissement de Paris, lorsque je marchais pour aller chez Catherine Dupin, disent bien pour moi le processus d’agression sexuelle sur image charnelle. Sur
un mur, il y a plusieurs mois, près d’un chantier clôturé par des
panneaux verts, on a collé, dessiné une personne debout. Une femme,
belle. Elle
porte une robe blanche, elle fume, sa main gauche sur la hanche, un
geste
gracieux. Le regard noir, direct arrête les passants. Si elle parlait,
que
dirait-elle ? D’une semaine à l’autre, j’ai assisté à la
dégradation
progressive de l’image, de la jeune femme à qui on a arraché des
morceaux de sa
robe, de haut en bas, depuis le visage jusqu’aux pieds. Femme déchirée
par des
mains rageuses, haineuses. Elle a en partie disparu sous des papiers
collés
puis arrachés comme la robe blanche. Elle a disparu, on l’a assassinée
par
harcèlements multiples. Meurtre sexuel du féminin. Attaques violentes
contre
une femme affichée, une femme de papier qui représenterait toutes les
femmes qui
s’exposent, insolentes de beauté.
Symboliquement,
on viole une femme, on tue les femmes.
Pour
ces trois mois, je n’ai rien d’autre à dire.
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